TousPros
#PLATDERESISTANCE
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HORS-SÉRIE
#RENCONTRE
L'histoire de Jean
et de ses dark kitchens
Restaurateur à succès avec six adresses
parisiennes et niçoises, Jean Valfort
a lancé Dark Kitchen en 2018.
À la tête de cuisines à Paris
et à Bordeaux, il croit fermement
en l'avenir de cette restauration
"hors les murs", portée par la demande
des 20-30 ans, les digital natives.
Les dark kitchens sont-elles l'avenir
de la restauration?
Ľ'un des avenirs ! Je reste persuadé que la restau-
ration traditionnelle continuera à vivre, car nous
avons tous besoin de moments de convivialité et
de socialisation. La dark kitchen est une réponse
à une demande qui explose: de nombreuses
études montrent que la livraison représente un
énorme marché pour les années à venir. Toute
une génération vit désormais en mode digital:
son cinéma est digital (Netflix), elle fait son
shopping en ligne, partage des voitures sur des
plateformes numériques, etc. Ces nouvelles habi-
tudes de consommation sont ancrées durable-
de travaux, moins de crédit -, d'allumer une
tablette et de faire un peu de marketing. Ce nest
pas tout à fait aussi simple cependant. Il faut une
organisation au carré pour limiter le personnel,
une parfaite régularité dans la préparation des
son. La dark kitchen surfe aussi sur le manque repas, des plats compatibles (on utilise la même
viande pour nos burgers et nos tacos), etc. Il faut
carré dans les grandes villes: pourquoi investir aussi savoir faire exister une marque et la mettre
en avant sur les applications de livraison et les
ment et portent le développement de la livrai-
de temps des urbains et le coût élevé du mètre
dans une cuisine de 10 m? chez soi quand on
peut se faire livrer en économisant au final du
temps (celui des courses, de la préparation, etc.)
et, tout bien compté, de l'argent?
réseaux sociaux.
Les dark kitchens sont-elles simplement
du fast-food amélioré?
Je dirais plutôt que l'on fait de la "comfort food",
typiquement le burger qui fait du bien après une
dure journée de travail. Nous ne transigeons pas
sur la qualité de nos viandes, d'origine française,
de nos buns, fabriqués par une boulangerie arti-
Les restaurants traditionnels peuvent
faire de la livraison. Qu'apportent
de plus les dark kitchens?
Personnellement, j'ai d'abord fait de la livraison
à partir de mes restaurants. Mais le modèle est
un peu bâtard: on se concentre spontanément sanale, de nos légumes, issus de producteurs
davantage sur les clients en salle que sur les
livraisons, qui passent au second plan. Cela peut culinaire à prix très étudiés grâce aux volumes
allonger le temps d'attente pour le client livré, de livraison importants. Par ailleurs, nos clients
engendrer de l'insatisfaction et, à terme, faire
baisser les commandes en ligne. Par ailleurs, la
locaux, etc. Bref, nous proposons une qualité
vont vieillir, devenir parents et être à terme plus
exigeants en matière de cuisine. Le concept
devra donc évoluer avec leurs attentes.
présence des livreurs devant ou dans le restau-
rant est parfois mal perçue par les clients en salle.
Ce sont toutes ces raisons qui nous ont amenés à
créer Dark Kitchen. Une solution qui nous per-
met d'optimiser la chaîne de production dédiée
à la livraison.
Le restaurateur reste-t-il maître chez lui
face aux applications de livraison?
Il y a peu d'applications, essentiellement trois
en France (Just Eat, Uber Eats et Deliveroo), et
beaucoup de restaurateurs. Nous n'avons pas de
pouvoir de blocage, bien sûr, mais, selon moi,
il s'agit plutôt d'une interdépendance que d'une
dépendance pure et simple. Les plateformes ont
aussi besoin de nous et d'offres de qualité pour
La simplicité de mise en euvre est-elle
le principal atout des dark kitchens?
Oui, car il suffit d'acheter ou de louer les mètres
carrés strictement nécessaires à une cuisine pro-
fessionnelle – pas de fonds de commerce, moins
nourrir leur business!